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Les amours tragiques de Geneviève Bréton

Histoire d'archives n°48

Photo: Geneviève Bréton dans les années 1885 (collection Olivier Fouret)

Geneviève Bréton (1849-1918) est une figure émouvante et quelque peu oubliée de l’histoire du Plessis-Robinson. Son père, Louis Bréton, est le bras droit de Louis Hachette et sa mère, Zéline Auzat n’est autre que la belle-fille du grand éditeur. Les liens familiaux renforçant les liens d’affaires, quand les Hachette font l’acquisition du château du Plessis-Piquet (l’actuel hôtel de ville) en 1854, les Bréton s’installent tout naturellement au Petit château voisin (propriété autrefois située à l’emplacement de la Cité de l’enfance). C’est ainsi que Geneviève Bréton passe sa jeunesse et une partie de sa vie dans cette belle propriété de notre commune. En 1867, Geneviève a 18 ans et commence un journal intime qu’elle tiendra toute sa vie. Ce document, riche en anecdotes, nous fait entrer dans l’intimité d’une famille de la bourgeoisie intellectuelle de l’époque. Mais il retrace surtout l’histoire d’amour tragique de Geneviève avec un peintre de grand talent, disparu trop tôt, Henri Régnault.

Ils se rencontrent en 1867 en Italie où Henri séjourne après avoir remporté le prix de Rome. Débute alors une relation romantique entre les deux jeunes gens qui finira brutalement pendant la guerre franco-prussienne de 1870-1871 au cours de laquelle Henri Régnault, engagé dans l’armée, trouvera la mort à l’âge de 28 ans.

Portrait de Geneviève Bréton par Henri Régnault, août 1867.

Geneviève et Henri se côtoient à Paris, mais aussi au Plessis-Piquet où le peintre est introduit dans le cercle familial des Bréton. La jeune fille nous raconte par exemple dans son journal qu’un jour le peintre fait un croquis d’elle assise avec sa robe noire « dans une grande bergère Louis XVI du salon, de damas ancien gris-rose… en harmonie avec les boiseries grises et les belles tapisseries qui représentent les métamorphoses de Jupiter et l’histoire d’Ariane. Il m’a fait mettre debout, puis à contre-jour avec le parc pour fond » (Le Plessis-piquet, 17 octobre 1867). En avril 1868, alors que son ami est retourné à Rome, Geneviève se languit au Plessis-Robinson où le printemps se fait désirer : « Je suis volée, il n’y a ni rossignol ni printemps. Silence de la solitude de la campagne… ». Un an plus tard, on la retrouve débordante d’énergie : « Le soleil me réveille de bonne heure maintenant. J’aime ma chambre…, capharnaüm ; il y a au moins quinze statues, quinze dessins, des troupeaux de livres, une foule de plante et de fleurs…J’ai fait de la botanique enragée toute la matinée (l’érable, la verveine bleue des prés et des bois, un narcisse, le dernier du jardin) » (Le Plessis-piquet, 26 avril 1869).

Photo: L'intérieur cossu de la propriété des Bréton (collection Olivier Fouret)

 

 

Mais très vite, la guerre menace et les Parisiens pressentent l’arrivée des Prussiens : « J’ai été au Plessis dire adieu à mes amis, les grands arbres, chers confidents discrets de ma jeunesse… de ma vie, de mon cœur. » (17 septembre 1870). Deux jours plus tard, Geneviève nous avertit : « Ils sont au Plessis. Ils, les maudits, les Prussiens » (19 septembre 1870). Lors du siège de Paris, les produits de la terre du Plessis leur permettent de résister à la disette : « Madame Bréton, la terrible reine-mère, transporta dans les écuries de leur résidence parisienne toute la basse-cour du Plessis-Piquet. Nous nous trouvâmes en possession d’une vache laitière, d’un cochon, même de faisans, de poules, de lapins… ».

À la mort d’Henri, quelques jours seulement après avoir obtenu l’accord de ses parents pour leur mariage, Geneviève est dévastée. Elle a 21 ans et perd, en même temps que la foi, le goût de l’existence. Elle s’engage à l’Ambulance Internationale de la Croix Rouge, improvisée sur les Champs-Elysées jusqu’ à la fin de la guerre en mai. Il lui faudra dix ans pour surmonter cette épreuve, se mariant, en 1880 avec Alfred Vaudoyer architecte lui-même veuf. Comme elle l’affirme dans son journal : « Nous ne sommes plus jeunes, nous avons souffert tous deux. J’ai foi en son amour et je réponds du mien ». Leur fils, Jean-Louis Vaudoyer, né au Plessis-Piquet en 1883, sera conservateur du musée Carnavalet, administrateur de la Comédie française et verra sa carrière d’écrivain couronnée par son élection à l’Académie française en 1950. 

Ainsi à la lecture du journal de Geneviève Bréton, au-delà de la trajectoire personnelle de cette jeune fille, c’est tout un monde qui rejaillit peuplé de figures qui associent étroitement Le Plessis-Piquet à la vie intellectuelle, littéraire et artistique de la France. 

Sources :

BRETON, Geneviève, Journal 1867-1871,Ramsay, 1985
VARRO, Joseph, Les amours dramatiques de Geneviève Bréton et de Henri Régnault dans les dernières années du Second Empire
Les œuvres d’Henri Régnault sont conservés dans les plus grands musées (Louvre, Orsay, Versailles).
VARRO, Joseph, Les amours dramatiques de Geneviève Bréton et de Henri Régnault dans les dernières années du Second Empire
Les œuvres d’Henri Régnault sont conservés dans les plus grands musées (Louvre, Orsay, Versailles).

 

 

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